Les océans dominent et définissent notre planète mais demeurent largement inexplorés. Notre compréhension des processus fondamentaux qui les régissent demeure très fragmentaire bien qu’elle soit essentielle et préalable à une utilisation durable du milieu marin et à la mise en place de mesures éclairées de protection, de réglementation ou d’adaptation. Les recherches répertoriées dans l’Axe 1 gagnent encore davantage en pertinence, en efficacité et en impact lorsque les technologies d’observation qui les appuient se développent, lorsque la connaissance des processus qui régissent la circulation de l’eau et de la glace progresse et quand l’activité des organismes marins et les flux de matière et d’énergie sont mieux mesurés, compris et modélisés. Les équipes de Québec-Océan travaillent en ce sens sur quatre thématiques qui appuient un ou plusieurs thèmes de l’axe 1.
Bien qu’une grande part de la recherche océanographique doive se faire à partir de navires ou de la côte, ces moyens ne permettent pas de pleinement s’attaquer aux échelles de temps et d’espace à considérer pour répondre aux grands enjeux environnementaux et suivre le pas des changements climatiques. La conception et le déploiement de nouveaux moyens de mesure assortis de méthodes innovantes de traitement des données massives et de modélisation s’impose. Ces moyens incluent la télédétection et divers engins autonomes munis de capteurs qui renseignent sur la structure physique, chimique et biologique de l’océan. La modélisation numérique couplée physique-biologie permet quant à elle de combler les intervalles entre les observations ponctuelles, d’évaluer l’impact relatif de différents forçages sur le fonctionnement de l’écosystème, puis d’élaborer des scénarios plausibles de l’état futur de l’océan face aux perturbations anthropiques.
Afin de multiplier les capacités d’observation et de veille écologique, l’équipe met au point de nouveaux algorithmes pour mieux exploiter les données de télédétection. Elle développe, teste ou adapte des moyens de mesure (p. ex., capteurs, bouées profileuses, planeurs et véhicules autonomes sous-marins et aériens) et affine ou développe des outils de modélisation.
Le mouvement de l’eau de mer peut être induit, modifié ou contraint par un ensemble de facteurs, incluant les marées, le vent, la rotation terrestre, la glace, les différences de température et de salinité, les apports d’eau douce, la charge sédimentaire et la végétation. Ces facteurs rendent la circulation complexe et très variable, et donc difficilement prévisible. Cette variabilité, qui va de l’échelle millimétrique qui caractérise la turbulence jusqu’aux milliers de kilomètres couverts par les plus grands courants océaniques, doit être mieux quantifiée afin de mieux comprendre les courants, la trajectoire des glaces et les interactions entre processus physiques, chimiques et biologiques. Une bonne représentation de ces processus est nécessaire à l’évaluation des flux de nutriments ainsi que du transport et de la dispersion des polluants anthropiques, des micro-plastiques et des toxines naturelles en milieu marin.
L’équipe étudie la mécanique fondamentale de l’océan à l’aide de mesures en mer, d’expériences en laboratoire, de modélisations numériques et de nouvelles théories. Elle étudie les vagues, les tourbillons, les fronts, la glace de mer, la turbulence, les ondes internes et la convection.
Certains éléments chimiques, tels l’azote, sont souvent limitants pour la production primaire en milieu marin. La mise en lumière des processus chimiques et microbiens qui affectent la circulation et la disponibilité de ces éléments dans l’écosystème s’avère essentielle pour en comprendre le fonctionnement et la productivité. Par ailleurs, les processus physiques verticaux et horizontaux qui régissent les échanges et les transformations de matière en milieu marin sont encore peu compris et quantifiés. Le long du littoral, les flux d’eau douce et de matière ponctuels ou diffus apportent plusieurs substances qui affectent la productivité biologique ainsi que l’accumulation et la dynamique des sédiments qui meublent le fond. L’échange de différentes molécules entre des habitats qui partagent des espèces s’avère crucial pour leur fonctionnement et la mise en place d’aires marines protégées. A la jonction eau-sédiment, la déposition des débris organiques nourrit les communautés benthiques. Les processus géochimiques du sédiment superficiel agissent en retour sur l’eau en y relâchant des nutriments et des gaz. A l’interface air-océan, plusieurs phénomènes, dont la formation de microcouches et les processus photochimiques liés au rayonnement solaire, font en sorte que l’océan atténue ou accentue la charge atmosphérique en gaz à effet de serre.
L’équipe mesure et modélise les flux de gaz et de matière dans l’océan superficiel et profond, le sédiment et le littoral pour mieux comprendre le fonctionnement de l’écosystème marin, comment il est affecté par les échanges à ses frontières et agit en retour sur la charge atmosphérique de gaz à effet de serre. Elle étudie le détail des flux macro-élémentaires (azote, carbone) et micro-élémentaires (métaux traces, p. ex., fer et cuivre) en milieux pélagiques et benthiques en lien avec la richesse spécifique et la composition fonctionnelle des communautés microbiennes (outils génomiques).
Afin de valoriser les écosystèmes marins en évaluant et réduisant efficacement les impacts de l’activité humaine sur ces derniers, il importe de mieux connaitre le comportement des différentes espèces clés, comment elles utilisent l’habitat et répondent aux fluctuations et aux changements du milieu. Il importe aussi de mieux comprendre les principes qui régissent la dispersion des organismes, la connectivité entre les populations, et comment les processus de compétition et de prédation structurent les communautés biotiques. Alors que certaines espèces ont un cycle vital et un comportement relativement fixes qui les rendent particulièrement vulnérables au changement, d’autres, comme les espèces envahissantes, ont un grand potentiel d’acclimatation qui leur permet de se répandre et d’altérer les communautés. Certains organismes peuvent produire des toxines néfastes, alors que d’autres synthétisent des substances d’intérêt pour l’industrie et la médecine.
Des bactéries aux mammifères marins, l’équipe étudie et modélise les cycles vitaux, la physiologie, l’alimentation, le succès reproducteur et la survie des espèces ainsi que les mécanismes qui régissent leurs interactions. Les techniques employées incluent le marquage, le traçage isotopique, le recensement visuel, l’acoustique et la télédétection, ainsi que des approches mathématiques et de modélisation. Plusieurs outils sont développés puis utilisés pour mesurer les réponses écosystémiques, incluant la méta-analyse, la génétique du paysage, la productivité, la génomique fonctionnelle et différentes mesures de la biodiversité. Les résultats permettent de mieux comprendre les principes d’organisation au sein des écosystèmes marins et fournissent des bases factuelles pour appuyer la mise en place de mesures de protection et de conservation des espèces et des habitats.
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